A propos du réalisateur : 

Özcan Alper est un réalisateur et scénariste turc d’origine Hemshin. Son premier film, Sonbahar, a été projeté dans plus de 60 festivals et a remporté près de 40 prix. Il a été nominé pour la découverte européenne par l’Académie européenne du cinéma. Son deuxième long métrage, Le Temps dure longtemps, a été présenté en première au 36e Festival international du film de Toronto. Son troisième long métrage, Souvenirs du vent, a été soutenu par la Cinéfondation L’Atelier du Festival de Cannes et le Fonds Hubert Bals du Festival international du film de Rotterdam. Nuit noire en Anatolie, son quatrième film, a bénéficié du soutien du Fonds mondial du cinéma de la Berlinale et de l’Aide aux cinémas du monde (CNC) français. Özcan Alper a récemment achevé le film original turc de Netflix, Le Festival des Troubadours.

A propos des interprètes : 

- Berkay Ateş est un comédien Turc qui tient ici le rôle principal Ishak. Diplômé d’Études Théâtrale, il a débuté dans le long-métra Yarım Kalan Mucize. Depuis on a pu le voir aussi bien à la télévision qu'au cinéma et notamment dans les films Abluka - Suspicion, Cukur et Alev Alev, Passed by censor.

- Cem Yigit Uzumoglu est également un acteur Turc. Tout jeune, et bien qu'il ait un rôle moindre dans ce long métrage - celui d'Ali - il dégage il telle force tout en étant fragile qu'il est bon de le présenter. On a pu le voir à la télévision mais également dans des films comme Rancune et sera à l'affiche de Ask mevsimi. 

De nombreux autres personnages qui ont un rôle primordial mais que je ne saurais tous citer.

Note d'intention du réalisateur : 

"Les choses que j’ai vues, lues et observées dans mon propre pays peuvent être considérées comme les premières graines de ce projet cinématographique. 

En Turquie, de nombreux sujets de la vie quotidienne ne peuvent plus être abordés ouvertement ; tout a été transformé en question d’importance nationale. Chaque problème est devenu une question nationaliste et il semble maintenant tout à fait normal que des livres ouvertement racistes et provocateurs de conflits tels que Mein Kampf d’Hitler peuplent les listes des best-sellers. Ce qui m’inquiète en tant que cinéaste, c’est que tant de choses ont été normalisées, en particulier les modes de pensée nationalistes et racistes. Avec cette normalisation, une tendance claire à accepter le pouvoir autoritaire en général et un État autoritaire en particulier est apparue, tandis que la société semble figée en état de choc, comme un cerf dans les phares d’une voiture. Cette montée du racisme et du nationalisme, associée à cet état de choc, a entraîné plusieurs drames dans toutes les régions du pays, où des dizaines de personnes ont perdu la vie.

Un certain nombre d’articles que j’ai lus à ce moment-là forment l’épine dorsale du scénario. Tout d’abord, un journaliste, que je connaissais indirectement, qui a été violemment tué au milieu de la rue, lors d’une innocente bataille de boules de neige. Deuxièmement, un jeune étudiant qui est parti travailler pendant l’été dans une ville connue pour ses inclinations nationalistes ; une nuit, l’étudiant a disparu, et la recherche désespérée du père n’a reçu aucune réaction au sein de la société.

L’histoire du film se déroule parmi des gens ordinaires dans une petite ville de montagne. J’ai vu de nombreuses photographies représentant un tel environnement sous de nombreux régimes autoritaires à travers le monde. Ce qui me motive principalement et me pousse à réaliser ce film, c’est le processus politique qui constitue l’arrière-plan de l’histoire. Avec ce film, j’essaie de montrer comment les désirs réprimés par la société, la sexualité non exprimée, peuvent créer un climat de peur et de violence". - Özcan Alper

Alors que le film débute après des faits bien précis, Ishak revient dans son village auprès de sa mère malade. Il va revoir d'anciens amis avec qui il n'avait plus de relations et se remémorer un passé qui l'a justement fait fuir. 

Le réalisateur, au fur et à mesure de son long-métrage va nous mener vers l'intrigue et les faits qui se sont déroulés. A l'aide de flash back, il nous fait revivre l'arrivée d'Ali un garde-forestier qui fait trop bien son travail et qui dérange, et ce qui va en découler. 

Faisant monter le suspens doucement, jusqu'au dénouement final, Özcan Alper mène parfaitement le spectateur là où il veut et aborde de différents sujets comme l'homosexualité, la différence, l'importance des hommes dans ce pays et surtout dans les petits villages ou la femme est souvent reléguée au second plan. Il nous prouve que parfois rien n'évolue et que des hommes mal intentionnés font régner leur propre loi.

On s'attriste en voyant ce père et sa fille, cherchant en vain depuis des années des traces d'Ali qui a disparu. On se doute qu'il n'est plus de ce monde, mais tout comme Ishak, on se met à croire qu'il est possible de retrouver ce qu'il est advenu de lui. 

Avec des paysages grandioses, et peu commun le réalisateur nous propose de superbes images.

La violence dont peuvent faire preuve certains protagonistes est assez cruelle. Ishak veut, en revenant dans ce lieu ou tout c'est passé, se réhabiliter moralement avec lui-même et demander pardon au mal qu'il a pu faire et fera tout pour retrouver le corps d'Ali. 

Nuit noire en Anatolie démontre que certains êtres n'ont pas de regrets, peuvent devenir des monstres, alors que d'autres ne pourront pas vivre avec ce qu'ils ont fait et feront tout pour tenter de se rattraper quitte à y laisser leur vie.

Crédits photos et vidéo : Outplay Fims