Critique film documentaire Mauvaises filles
MAUVAISES FILLES
Synopsis :
Insoumises, rebelles, incomprises ou simplement mal-aimées. Comme tant d'autres femmes en France, Édith, Michèle, Éveline et Fabienne ont été placées en maison de correction à l'adolescence. Aujourd'hui, portée par une incroyable force de vie, chacune raconte son histoire et révèle le sort bouleversant réservé à ces « mauvaises filles » jusqu'à la fin des années 70.
Émérance Dubas présente ce documentaire qui sera en salle le 23 novembre prochain.
Née à Angers, Émérance Dubas vit et travaille à Paris en tant que réalisatrice et scénariste. Formée en Histoire de l’art, elle débute par des installations audiovisuelles et des portraits d’artistes : Dolo, le dernier Dogon (2002), Poupées de lumière (2008), Retour à la base (2011), Buren dans la ville (2014).
Mauvaises Filles est son premier long métrage. Initié en 2015, ce film documentaire occupe une place grandissante dans sa vie et marque un tournant dans son travail. Filmer la parole et interroger la place des femmes dans la société sont aujourd’hui au cœur de ses réflexions.
A savoir :
La congrégation de Notre-Dame de Charité du Bon Pasteur est fondée à Angers en 1829 par sœur Marie-Euphrasie Pelletier, puis agréée en 1835 par le pape Grégoire XVI. Le Bon Pasteur connaît un succès phénoménal, essaimant partout en France, en Europe et en Amérique. Au milieu du XXe siècle, la communauté recensera près de 350 maisons dispersées à travers le monde. Pendant des décennies, cette institution religieuse se donne pour mission d’accueillir les filles en détresse, celles que l’on qualifie de «filles perdues», de «filles-mères», ou de «mauvaises filles».
Implanté sur tout le territoire français, le Bon Pasteur jouera un rôle majeur aux lendemains de la Seconde Guerre lorsque naît en France la justice des mineurs avec l’ordonnance du 2 février 1945. Désormais, l’éducation surveillée est distincte de l’administration pénitentiaire. C’est une avancée. Mais dans les faits, l’application de l’ordonnance de 1945 montre une différence de traitement entre les filles et les garçons. Tandis que l’État envoie ces derniers dans des internats publics, il place en priorité les filles dans des établissements religieux dans le but de garantir leur bonne conduite. Le corset moral est tel que les filles qui ne répondent pas à la norme prennent le risque d’être enfermées par le juge des enfants ou par leurs familles au Bon Pasteur ou dans d’autres congrégations religieuses comme le Refuge de la Charité.
Cinq protagonistes qui ont été envoyées dans ce lieu parlent de ce qu'elles ont pu vivre :
- ÉDITH
Née en 1927 à Neuvy-sur-Loire (Nièvre), elle entre à l’âge de 6 ans au Bon Pasteur de Bourges (Cher) suite à la séparation de ses parents. Son placement dure 9 ans de 1933 à 1942. Édith a quatre enfants et exerça le métier de vendeuse en région parisienne. C’est sa voix qui nous guide à l’intérieur du Bon Pasteur de Bourges, dont les bâtiments sont à l’abandon depuis une trentaine d’années.
- ÉVELINE
Née en 1947 à Voise (Eure-et-Loir), elle grandit dans une famille nombreuse. À l’âge de 15 ans, elle est envoyée par le juge des enfants au centre d’observation du Bon Pasteur d’Angers (Maine-et-Loire) avant d’entrer au Bon Pasteur du Mans (Sarthe). Son placement dure quatre ans de 1962
à 1966. Elle a trois enfants et travaille à Paris en tant que secrétaire pour un syndicat de salariés. Retraitée, Éveline vit aujourd’hui en Ille-et-Vilaine.
- FABIENNE
Née sous X en 1956 à l’Hospice Saint-Vincent-de-Paul (Paris), elle est prise en charge par plusieurs institutions : au Nid à Cherbourg (Manche), puis aux Buissonnets à Saint-Étienne-de-Montluc (Loire-Atlantique). À l’âge de 14 ans, elle est envoyée par le juge des enfants au Refuge de la Charité de Toulouse (Haute-Garonne). Son placement dure quatre ans de 1970 à 1974. Elle a trois enfants et vit à Paris, où elle exerce le métier de directrice de casting pour le cinéma et la télévision.
- MICHÈLE
Née en 1940 à Roanne (Loire), elle grandit entre la France, l’Allemagne et le Maroc. À l’âge de 15 ans, elle est conduite par sa mère au Bon Pasteur du Puy-en-Velay (Haute-Loire). Son placement dure quatre ans de 1955 à 1959. Elle a trois enfants et assure la comptabilité de la manufacture d’orgues de son mari. Retraitée, Michèle vit dans le Vaucluse.
- MARIE-CHRISTINE
Née en 1948 à Nantes (Loire-Atlantique), elle grandit aux côtés de sa grand-mère. À l’âge de 15 ans, elle est envoyée par le juge des enfants au centre d’observation du Bon Pasteur d’Angers (Maine-et-Loire) avant d’entrer au Bon Pasteur d’Orléans (Loiret). Elle est ensuite transférée aux
Dames Blanches à Nantes. Son placement dure trois ans de 1964 à 1967. Elle a deux enfants et exerce le métier d’animatrice sportive. Retraitée, Marie-Christine vit à Nantes.
Parmi ces 5 femmes, une est toujours en voix off, et celles qui se livrent le plus sont Eveline, Fabienne et Michèle.
A moins de connaître l'existence de ces lieux, j'étais loin de me douter que de tels endroits aient pu exister. Le titre Mauvaises filles ne signifie pas spécialement que ces femmes méritaient d'y être envoyées.
De ces lieux il ne reste que des bâtiments abandonnés, des vitres cassées, des inscriptions aux murs. Mis à part quelques photos et vidéos que l'on peut apercevoir dans ce documentaire, c'est plus par la parole de ces femmes que l'on apprend ce qu'il s'y passait.
Des lieux inadmissibles, avec une vie monacale et stricte. Des religieuses qui n'offraient pas d'amour et un passé qui vient encore les hanter.
On peut regretter de ne pas en savoir plus sur leur parcours par la suite, leur vie, leur métier, leur famille, mais on découvre tout cela dans le dossier de presse.
Touchant, dur, ce film montre une triste réalité et des femmes qui ont été humiliées, et qui a l'heure actuelle sont parfois encore honteuses de leur passé. Elles n'ont pas à l'être, celles et ceux qui les enfermaient devraient l'être et peut-être que ce documentaire déliera certaines langues qui n'ont jamais osé parler.
- Champs-Élysées Film Festival 2022 | Compétition - Long métrages indépendants français
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Crédits photos et vidéo : Les Films de l'Oeil Sauvage - Arizona Distribution
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